AFFAIRES. Quelques entreprises de la région tentent actuellement de se réorienter vers les besoins devenus essentiels avec la crise entourant le COVD-19. Du nombre, on retrouve Confections Katvin de Sainte-Justine et Confections Cliche de Saint-Odilon qui font même équipe dans l’espoir de décrocher quelques contrats pour la fabrication d’équipements médicaux.
La fourniture de masques et de jaquettes ou blouses dédiées au domaine de la santé font partie des projets des deux entreprises.
(Photo : gracieuseté)
Dans un premier temps, Confections Katvin a déjà débuté la fabrication de masques dédiés surtout au marché des pharmacies. «Nous devions arrêter nos activités lorsque l’annonce du confinement s’est faite, sauf que l’un de nos clients nous avait déjà acheminé une commande pour fabriquer des masques qui seraient dédiés à l’Europe. Ce sont des masques de procédure et non les N-95 dont tout le monde parle. Ils sont faits à 100 % de polyester et réutilisables 25 fois. Pour l’instant, le gouvernement ne veut pas de ce type de masque dans le milieu hospitalier. Nous sommes sur une cadence d’environ 3 000 masques par jour, sauf qu’il y a une demande pour des jaquettes d’hôpital aussi», souligne le président de l’entreprise, Vincent Chabot.
C’est là où Confection Katvin, Confections Cliche et une autre entreprise de Québec pourraient aller chercher quelques contrats. Cette dernière est généralement spécialisée dans la conception et la fabrication de vêtements de tricot et propose son expertise dans la fabrication de masques sanitaires, de masques chirurgicaux 3M et des blouses de travail pour répondre aux besoins du réseau de la santé.
«On travaille quelques projets en collaboration, dont certains sur d’autres types de masques. Tout le monde s’entraide un peu aussi à l’heure actuelle et partage ses contacts. On doit bientôt recevoir quelques échantillons de blouses pour les hôpitaux, ce qui nous permettra de déposer quelques soumissions. Un autre de nos clients attend d’avoir une approbation de Santé Canada pour son masque, alors ce serait l’un de nos mandats, au niveau des blouses. Notre client nous dit qu’il n’y a pas de limites, alors nous allons en faire dès qu’on le pourra», explique M. Cliche.
Avec 38 employés habituellement, l’entreprise de Saint-Odilon n’employait que quatre personnes la semaine dernière. Ce chiffre pourrait grimper à plus d’une douzaine, même si la fabrication doit se limiter à l’essentiel. «Nous étions partiellement ouverts, car nous fabriquons des cagoules pour les pompiers et des vêtements anti-feu pour la GRC, qui nous ont demandé de continuer. Nous fabriquons aussi des vêtements pour la marque Big Bill et eux aussi souhaitent se faire accréditer puisqu’ils fournissent des équipements pour les monteurs de lignes d’Hydro-Québec et d’Hydro One en Ontario.»
Vincent Chabot de Confection Katvin à Sainte-Justine.
Un marché sans limite
Les deux entreprises ne sont pas les seules à se reconvertir et l’équipement médical semble en inspirer plusieurs par les temps qui courent. Vincent Chabot ne croit pas que le marché puisse se saturer à court terme. «Il y a de la demande partout à travers le monde, c’est une pandémie. Personne ne travaille présentement dans certains pays comme l’Italie ou l’Espagne. La capacité de production des États-Unis est limitée par rapport à ce que peut faire la Chine. Difficile de voir où cela va nous mener à long terme.»
M. Chabot a maintenant hâte de voir quels avantages il pourra tirer des aides gouvernementales déjà annoncées. Il a déjà l’intention d’en faire bénéficier ses employés s’il devait être admissible. «Il est certain que l’on réduit nos marges actuellement pour essayer d’aider tout le monde. Si on s’aperçoit que nous pouvons avoir accès aux subventions gouvernementales annoncées par le fédéral, ce sont nos employés qui en seront les premiers bénéficiaires. Nous pourrons augmenter leurs salaires, car ils s’exposent davantage que les gens qui sont confinés à la maison.»
D’importantes précautions
Des mesures à l’interne ont été prises depuis l’annonce des fermetures, précise Vincent Chabot. «Nous avons demandé à nos employées de se limiter à une navette travail – maison – épicerie. Les postes de travail ont été distancés et tout est désinfecté le matin, le midi et le soir, que ce soit les machines, les poignées de porte, les lumières et autres. Chaque fille est responsable de son poste de travail et c’est un lavage de mains obligatoire à chaque fois que tu entres dans l’usine, même après une pause. Nous pouvons avoir jusqu’à 22 personnes en temps normal et présentement, nous sommes huit.»
Les mesures sont similaires à Saint-Odilon. «Nous avons distancé les machines passablement entre elles. Deux fois par jour, quelqu’un désinfecte les poignées de porte, les rampes d’escalier et les cadres de porte, bref, tout ce que les gens peuvent toucher. Les employées ont chacune une bouteille pour nettoyer leur équipement aussi. Il n’y a pas non plus de changement de couturière sur les machines non plus», mentionne M. Cliche.
Acheter localement
Dans l’actuel contexte de pandémie, Vincent Chabot a dit espérer que les gens auront un préjugé favorable envers les produits locaux, non seulement pour leur qualité, mais pour le maintien des emplois qu’ils procurent. Il salue également la compréhension des employés, toutes entreprises confondues, qui contribuent à cet effort.
«Présentement, ce ne sont pas le Bangladesh ou la Chine qui sont en poste pour répondre à la demande. Ce sera peut-être un de nos masques qui va sauver la vie d’un de vos proches. Nous acceptons d’aller au travail avec des prix plus que compétitifs, à peine pour absorber les dépenses, cependant on fait notre part pour l’économie et pour fournir de l’équipement nécessaire pour combattre la pandémie.»
Les deux entreprises ont pris des dispositions importantes pour sécuriser leurs employées.
Un baume dans des moments difficiles
L’annonce de nouveaux contrats potentiels, malgré la crise actuelle, arriverait à un bon moment pour les deux entreprises, chacune ayant des clients en sérieuses difficultés financières. Vincent Chabot précise que Confection Katvin est généralement spécialisée dans la confection de vêtements sportifs extensibles.
«Nos clients sont des compagnies de vélos, de triathlon, de yoga notamment. Il est certain que nous avons subi un dur coup récemment avec l’annonce de Louis Garneau de se mettre en faillite. Nous faisons partie des créanciers et c’était 75 % de notre chiffre d’affaires.»
À Saint-Odilon, ce sont les déboires du Cirque du Soleil qui posent problème, indique Stéphane Cliche. «Ils nous doivent quand même beaucoup, alors c’est pour ça qu’on souhaite continuer. Si on peut obtenir le contrat des blouses médicales, ça devrait nous donner une chance pour continuer, sauf que tellement de gens tentent de tirer leur épingle du jeu que ça en vient mêlant. Au jour le jour, ça change, alors c’est difficile de prédire qu’elle sera la demande.»
Selon les deux hommes d’affaires, le plus gros besoin que l’on distingue se situerait surtout aux États-Unis, notamment avec la valeur actuelle de la devise américaine. «Cela avantage la production canadienne, car le prix reviendrait à peu près au même que de les faire fabriquer en Chine, par exemple», résument les deux hommes.
L’annonce de la pandémie reliée au coronavirus s’est ajoutée aux problèmes déjà existants, ajoute Stéphane Cliche. «On fait de la gestion à la petite journée et on essaie de gérer le stress que cela occasionne du mieux que l’on peut. Je serais serein avec ça si ça durait trois semaines ou un mois, mais nous sommes dans l’inconnu. C’est pour cela que nous avons discuté avec nos partenaires et que nous sommes allés chercher des contrats. On ne sait pas combien de temps cela va durer.»
Source: Eric Gourde, La Voix du Sud, le 2 avril 2020